objectif : société

À la recherche de nouveaux territoires physiques et sémantiques, Edgar Sarin conçoit des expositions qui s’écrivent pendant leur temps de vie, sur mesure, dans l’espace même où elles se déploient. Il les compare à des organes peu fragiles, capables de naviguer à vue, de recevoir l’aléa, d’accueillir de multiples couches d’historicité, et autant de performances en équilibre entre composition et improvisation. En quête d’écologie du geste, il assoie les fondations de ses propositions en suivant un processus assez stable, au long cours : l’artiste commence par créer une réserve de matériaux simples, peu onéreux et de première proximité, comme du chêne, du tuffeau, ou de l’argile, qu’il va placer dans l’espace et laisser se poser. À partir de cette matière contextuelle et d’un certain nombre de savoir-faire, Edgar Sarin imagine un système qui se nourrit, qui se sculpte et s’informe jusqu’à atteindre un certain niveau de rayonnement.  Cette manière d’opérer est politique : il fait partie d’une génération d’artistes qui a remis en question le concept de l’exposition comme étant un objet intrinsèquement stérile, et qui gagne au contraire à s’envisager comme un espace sensible aux rythmes vivants, comme un lieu de déplacement et de recherche sur l’environnement immédiat, à l’écoute de l’harmonie collective. Ses expositions sont donc des structures fertiles, progressivement augmentées, dont la théorie et l’épaisseur sensuelle ne peuvent réellement se soupeser qu’en fin de monstration.

Éva Prouteau, critique d’art